Canicules + spongieuse = danger de feu 2

Actualités » Canicules + spongieuse = danger de feu 2

Canicules + spongieuse = danger de feu 2

L’Ouest canadien et nos voisins du Sud connaissent des niveaux de chaleur et de sécheresse qui n’ont pas été atteints depuis 1 200 ans.  Au Québec, des tornades frappent et on nous annonce une série de canicules pour l’été.  Le réchauffement climatique semble bien s’installer.

Un élément s’ajoute cette année qui risque de mettre la poudre au feu : la spongieuse.

Les œufs de cette chenille invasive originaire d’Europe ont survécu grâce à l’hiver doux que nous avons connu.  La spongieuse envahit les forêts de feuillus et laisse des acres complètement décimées.

Malgré plusieurs périodes de pluie en moins d’une semaine, plusieurs ruisseaux sur le mont Saint-Bruno sont sans eau.  (Photos : JMcD 24 juin 2021)
 

« Le problème se situe au niveau de la défoliation de plusieurs acres de forêt, qui laisse la canopée du sous-bois du mont Saint-Bruno complètement ouverte à l’intensité des rayons du soleil, » confirme Alain Fréchette, expert en sciences de l’environnement et représentant de la Fondation à la table d’harmonisation de la Sépaq.  « Cette ouverture assèchera le sol, où se trouvent une grande quantité de feuilles mortes et d’autres matières qui brûlent facilement. »

Le risque de feu cet été et pendant l’automne est une menace bien réelle et beaucoup plus importante que dans les années passées.

La canopée du sous-bois est remplie de feuilles mortes.  Normalement, les arbres laissent tomber leurs feuilles à l’automne, lorsque le risque de feu est atténué.
 

L’impact d’un feu de forêt

Le mont Saint-Bruno est une des sources principales qui contribuent à renforcir la biodiversité de la région métropolitaine.

Les arbres et autre végétation permettent de capter le carbone et purifier l’air, de réduire le risque d’érosion du sol, de contribuer à prévenir la pollution de l’eau et surtout de protéger contre le soleil, le froid et les intempéries.  La végétation est particulièrement importante dans la prévention de la sécheresse.

Comme le réchauffement climatique ralentit la régénération de la forêt, un feu d’envergure au mont Saint-Bruno serait dévastateur pour les milieux naturels de la montagne et de son pourtour pendant des années à venir.

Qu’en est-il de la faune ?  Les animaux sauvages survivent depuis des millions d’années aux feux déclenchés par la nature.  Ils perçoivent instinctivement le danger et s’éloignent, se réfugient dans l’eau, se cachent sous des roches, s’enfouissent dans la terre.

Enfin, ils utilisent le système D qu’ils ont aiguisé depuis le début de leur existence. Mais, une bonne partie des animaux et des insectes ne survivrait pas.

On estime qu’un minimum de 480 millions d’animaux ont péri dans les feux d’Australie en 2019-2020.

Les espèces qui survivent, dont les humains, seront aussi affectées par la toxicité des matières qui se consument lentement : les habitations sur la montagne et dans la zone périurbaine, les affiches du parc, la peinture orange fluo sur les roches…

Le plan d’action de la Sépaq

La prévention permettra de réduire le risque de feu sur le mont Saint-Bruno et dans les autres secteurs asséchés à la suite du passage de la spongieuse.

« La Sépaq a un plan opérationnel de gestion d’incendie avec les pompiers de la région, ainsi qu’avec la SOPFEU, » mentionne Cédric Landuydt, directeur de la Sépaq aux parcs nationaux du Mont-Saint-Bruno et des Îles-de-Boucherville. « La gestion de risque d’incendie comprend la signalisation, les interdictions de feu ainsi que des patrouilles sur le terrain, qui se poursuivront avec vigilance afin de minimiser ce risque. »

Attention : Vigilance extrême

En 2018, un des mégafeux qui a détruit des dizaines de milliers d’hectares de forêts californiennes près de la ville de Redding, a été déclenché par les étincelles résultant de la friction du métal sur l’asphalte, lors d’une crevaison.  Évidemment, la sécheresse extrême des environs n’attendait qu’une étincelle pour s’enflammer.

Les mégafeux, voire gigafeux qui détruisent des millions d’hectares de forêts, particulièrement en Australie, en Californie et dans l’Ouest canadien, nous ont montré que l’humain est de plus en plus confronté à des feux dévastateurs qui sont très difficiles à contrôler.

Le feu peut être déclenché naturellement par la chaleur du soleil ou la décharge de la foudre.  Néanmoins, c’est la négligence humaine qui en est la cause principale.

Il est certain que la Sépaq aura besoin de la vigilance soutenue des citoyens et citoyennes jusqu’à l’hiver.  C’est pourquoi il est préférable de :

  • Ne pas fumer sur la montagne et près des zones à risque.

  • S’assurer que les cigarettes et les allumettes soient bien éteintes où que vous soyez.  Le vent peut ranimer une cigarette ou une allumette que l’on croyait éteinte.
  • Éviter tout feu de camps et brûlage de débris (agricoles ou autre), surtout s’il vente.
  • Bien contrôler les flammes de son BBQ.
  • Demander à votre municipalité d’arrêter les feux d’artifices, qui sont plus polluants que la circulation et risquent de déclencher un feu.
  • Appeler rapidement 911 pour signaler tout incident de feu.

Solutions

Fay Johnston, épidémiologiste à l’université de Tasmanie, en Australie, et sommité mondiale en fumée des feux de forêt, propose deux solutions qui pourraient réduire le risque de feu à long terme: 1) nettoyer les arbres et autres végétaux morts et 2) contribuer massivement aux solutions pour combattre le réchauffement climatique.

Même s’il est préférable de nuancer sa première recommandation – certaines espèces comme les pics bois et les petits invertébrés dépendent du bois mort pour leur suivie et contribuent à la dégradation de la matière morte tout en recyclant les nutriments – tous les scientifiques s’entendent à dire que la deuxième recommandation de Fay Johnson est essentielle.  La biodiversité de la forêt sera enrichie, le risque de feu sera réduit et l’impact de la spongieuse aussi.

Oui, le coût est énorme, mais quel sera le coût de ne pas agir ?

Liens intéressants :

Gouvernement du Québec (MFFP) : Parefeu
Ville de Saint-Bruno : Incendies
Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest : Exposition à la fumée des feux de forêts

 

Photo :

Pompiers qui combattent un feu de forêt : BBC

Sources :

National Geographic, Le combat pour un air pur, édition d’avril 2021.
National Forest Foundation : What Happens to Wildlife During a Wildfire
Arbres Canada : Bienfaits des arbres