Les forêts primaires sont essentielles à notre survie

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Les forêts primaires sont essentielles à notre survie

La Fondation a signé la demande de l’association Primary Forest Alliance pour un moratoire sur l’activité industrielle dans les forêts primaires du monde entier.

Tout est connecté

Sans les forêts primaires, il n’y a aucune solution à la crise climatique.  Sans elles, l’extinction de toutes les espèces, y compris l’humain, n’est qu’une question de temps.

Les forêts primaires forment plus du tier des forêts de la planète et donnent vie aux deux tiers des espèces terrestres.  On y trouve l’eau douce la plus pure.

Non perturbées par une industrie depuis leur naissance, les forêts primaires sont des superorganismes complexes où tout ce qui vie est connecté.  Elles sont uniques et irremplaçables.

Leurs écosystèmes, d’une qualité exceptionnelle, régulent le climat.  Ces forêts de plus en plus rares possèdent les plus grandes réserves de carbone sur Terre.

En fait, elles emmagasinent plusieurs siècles de carbone, soit 30 % à 50 % de plus par hectare que les forêts qui ont déjà été coupées.

Du jamais vu dans l’évolution de la planète

L’humain détruit depuis quelques décennies ce que la Nature a pris des milliards d’années d’évolution à créer.

Les forêts primaires n’ont connu aucune activité industrielle avant les années 1980-90. La déforestation était surtout liée à de grands projets industriels tels les barrages, les routes, les mines, et à l’agriculture de subsistance des communautés locales. Toutefois, l’activité industrielle des dernières décennies change le portrait de l’évolution de la planète.

Source Global Forest Watch World Resources Institute

Quand le monde a pris un temps d’arrêt pour faire face à la pandémie, la perte de biodiversité se poursuivait.

À titre d’exemple, les 3,75 millions d’hectares de forêts tropicales primaires qui ont disparu en 2021 ont entraîné 2.5 gigatonnes d’émissions de dioxyde de carbone, soit l’équivalent des émissions annuelles de combustibles fossiles de l’Inde.

Trois pays ont une grande influence face à la perte d’habitat des forêts primaires car 61 % de ces forêts se trouvent sur leur territoire : la Russie, le Canada et le Brésil.

La production non durable vs la survie de la planète

Pour réussir, une corporation doit accélérer la vitesse de production de ses biens et services afin de répondre à la demande et surpasser la concurrence. Cette croissance obligée est un incontournable du monde des affaires.  Mais, l’envers de sa médaille n’est pas aussi rose.  Elle se traduit par une augmentation de la coupe d’arbres, par une extraction accrue de matières premières et par de nombreuses expéditions sur de longues distances.  Évidemment, l’empreinte énergétique générée détruit de plus en plus le vivant.

En 2022, le 28 juillet était le jour de dépassement où l’humanité a consommé l’ensemble de ce que la planète peut produire en un an sans s’épuiser. Nous vivons à crédit depuis.

Nous voulons des produits diversifiés bon marché toute l’année, mais ceux-ci sont issus de productions non durables.

La production non durable entraîne la perte d’habitats, l’agriculture intensive et les pandémies.  Et, elle contribue à la crise climatique.

Lorsque les scientifiques responsables de l’évaluation mondiale de la biodiversité ont examiné les registres d’expédition et les registres douaniers des marchés de la planète, ils ont identifié cinq produits responsables de la plus grande perte de biodiversité : le soya, le cacao, le café, l’huile de palme et le bœuf.  Ce dernier est la principale cause de perte des habitats sur Terre, surtout de nos forêts primaires.

Le phénomène de surconsommation qui évolue depuis plus de 50 ans est maintenant ancré dans nos habitudes de vie.  Les consommateurs choisissent des produits qui sont accessibles, jetables et à moindre coût, ce qui facilite la production de marchandises dont la durée de vie est intentionnellement limitée. Cette pratique engendre une surconsommation d’articles à usage unique au détriment de la planète.

Selon Maude Barlow, auteur de Still Hopeful : Lessons from a Lifetime of Activism, les pratiques du monde des affaires sont aux antipodes de la survie de la planète.

Comment renverser le cours de notre propre destruction ?

Les peuples autochtones : Des guides pour le bien-être des forêts

Selon l’ONU, les peuples autochtones et tribaux sont les meilleurs gardiens de nos forêts.  À titre d’exemple, le savoir-être et le savoir-faire de ces peuples, en Amérique latine et aux Caraïbes, engendrent des taux de déforestation nettement inférieurs au reste de la planète.  Le secret ? Des droits territoriaux collectifs reconnus par les gouvernements.

Pourtant, le mode de vie traditionnel des peuples autochtones, leur symbiose avec les forêts primaires, est tout de même menacée par l’activité industrielle.

Selon le shaman Yanomami Davi Kopenawa, son peuple est aux prises avec l’agriculture non durable et l’orpaillage sauvage.  Les Yanomami sont des chasseurs-cueilleurs et agriculteurs sur brûlis. La forêt et les arbres sont le socle des savoirs de ce peuple qui vit au nord du Brésil, dans les États du Roraima et d’Amazonas, au cœur de la forêt amazonienne. (Philosophie Magazine, Hors-série no 53)

Le dirigeant aura évidemment énormément d’influence sur les pratiques et les lois de son pays.  Le message du président brésilien Jair Bolsonaro, un fervent de l’exploitation de la forêt amazonienne, en est un exemple : Venez… les affaires sont bonnes au Brésil ! Le sort des forêts primaires et des peuples autochtones ne lui importent peu.  Selon Matt Sandy de Time, le président Bolsonaro a licencié les inspecteurs de l’environnement qui s’opposaient à son message. Depuis son inauguration en janvier 2019, les images satellite confirment que la déforestation sur son territoire a augmenté de 92 %.

Combien de décideurs gèrent dans l’immédiat pour palier un problème d’économie ou de pouvoir plutôt qu’avec la vision du bien-être des générations futures qui dépendent de la Nature ?  Qu’en est-il de la gouvernance de nos dirigeants  ? Les forêts primaires canadiennes sont-elles protégées ?

La forêt du Grand Ours : un idéal à atteindre

Le Canada est le gardien d’environ 16 % de ce qui reste des forêts primaires à l’échelle mondiale.

Environ 94 % des forêts du Canada font partie de terres publiques, ce qui permet au gouvernement de réglementer les pratiques de récolte et d’appliquer l’aménagement du territoire suivant des lois et d’autres politiques.

La Great Bear Rainforest, une forêt primaire tempérée humide de 3,6 millions d’hectares, qui s’étend de la côte sud de la Colombie-Britannique à l’Alaska, est protégée depuis 2016 : 85% de la forêt du Grand Ours est interdit à l’exploitation arboricole, particulièrement les coupes à blanc, tandis que 15% de ce territoire est soumis aux normes les plus strictes en Amérique du Nord en matière d’exploitation forestière commerciale.  Cet accord du gouvernement britanno-columbien et d’une vingtaine de communautés autochtones a pris 20 ans à se réaliser.

La protection des forêts boréales

Qu’en est-il des forêts boréales, cet immense territoire que l’on surnomme « Le poumon vert du Nord » ?

La zone boréale forme une large ceinture qui fait le tour de l’hémisphère Nord. Cette ceinture s’étend sur 9 000 km d’est en ouest en Eurasie, de la mer d’Okhotsk à la mer de Norvège, et sur 5 500 km en Amérique du Nord, de Terre-Neuve à l’Alaska.  Ces forêts représentent 14 % de la superficie de la planète et 33 % de sa zone boisée.

Le gouvernement fédéral mise sur l’aménagement forestier durable comme une manière de gérer les forêts dans l’objectif d’équilibrer les avantages environnementaux, sociaux et économique qu’elles offrent au fil du temps.

Pourtant, une analyse du Naturel Resources Defence Council (NRDC) confirme que l’activité forestière dans la forêt boréale est non durable.

Le NRDC a constaté que « les entreprises d’exploitation forestière industrielle Résolu, Domtar et Aditya Birla Group, au Québec et en Ontario, s’approvisionnent en bois à des niveaux alarmants dans des zones où les normes forestières sont faibles et ne garantissent pas les protections essentielles en matière d’environnement et de droits de la personne. En outre, une quantité importante de bois est prélevée dans des unités forestières qui chevauchent l’habitat menacé du caribou boréal. »

Les conclusions du rapport du NRDC révèlent notamment les faits suivants :

  • Ensemble, ces trois entreprises ont fourni en un an une quantité de bois qui, si elle était convertie en planches de 2’ x 4’, représenterait sept fois la distance entre la Terre et la Lune.
  • Les répercussions de l’industrie augmentent dans les zones vulnérables. Par exemple, depuis 2013, l’empreinte de l’exploitation forestière dans une unité forestière de 2,5 millions d’acres critique pour les espèces menacées a augmenté de plus de 430 %.
  • Aucune des entreprises ne s’est publiquement engagée à exiger le consentement donné librement au préalable en connaissance de cause des peuples autochtones potentiellement touchés par les activités forestières fournissant du bois aux usines des entreprises.

Alors comment assurer la protection de la forêt boréale ? Le bois étant en demande sur les marchés intérieurs et surtout extérieurs, l’éternelle bataille entre la production non durable et le besoin de protéger nos forêts demeure bien réelle.

« Il est temps que la protection de nos forêts, primaires et autres, soit au cœur du débat sur la crise climatique.  Nous invitons les gouvernements à réaliser un accord qui s’inspire de celui de la forêt du Grand Ours afin de protéger les forêts boréales de la planète, » demande Tanya Handa, biologiste et présidente de la Fondation du Mont-Saint-Bruno.

Quelle opportunité d’avoir toutes ces personnes à Montréal lors de la COP15.